Cet arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation en date du 12 février 2020 porte sur l'évaluation du préjudice en cas de concurrence déloyale.
La société Cristallerie de Montbronn, spécialisée dans la création et la fabrication de produits en cristal, a assigné la société Cristal de Paris pour des pratiques commerciales trompeuses consistant à présenter des produits en verre, cristallin ou luxion mélangés à des produits en cristal, à se présenter comme un "haut lieu du verre taillé en Lorraine" et un "spécialiste de la taille". La société Cristallerie de Montbronn demande la cessation de ces pratiques illicites et une indemnisation de son préjudice.
La cour d'appel a condamné la société Cristal de Paris à verser à la société Cristallerie de Montbronn une indemnité de 300 000 euros en réparation de son préjudice résultant des actes de concurrence déloyale. La société Cristal de Paris forme un pourvoi en cassation.
La question posée à la Cour de cassation est de savoir si l'évaluation du préjudice peut être basée sur l'avantage concurrentiel indu dont a bénéficié l'auteur des actes de concurrence déloyale, modulé en fonction des volumes d'affaires respectifs des parties affectées.
La Cour de cassation rejette le pourvoi. Elle rappelle que le juge apprécie souverainement le montant du préjudice et qu'il n'est pas tenu de préciser les divers éléments de son évaluation. Cependant, le juge ne peut refuser d'évaluer un dommage dont il a constaté l'existence en son principe et ne peut allouer une réparation forfaitaire sans rapport avec l'étendue du préjudice subi. En matière de responsabilité pour concurrence déloyale, il s'infère nécessairement un préjudice, même moral. Lorsque les effets préjudiciables d'actes de concurrence déloyale sont difficiles à quantifier, notamment lorsqu'ils consistent à parasiter les efforts et les investissements d'un concurrent ou à s'affranchir d'une réglementation, il est possible d'évaluer le préjudice en prenant en compte l'avantage indu dont a bénéficié l'auteur des actes de concurrence déloyale, modulé en fonction des volumes d'affaires respectifs des parties affectées.
Portée : Cet arrêt confirme que la réparation du préjudice en cas de concurrence déloyale peut être évaluée en prenant en considération l'avantage indu dont a bénéficié l'auteur des actes de concurrence déloyale, modulé en fonction des volumes d'affaires respectifs des parties affectées. Cette solution permet de tenir compte des difficultés à quantifier les effets préjudiciables de certaines pratiques de concurrence déloyale.
Textes visés : Article 1382, devenu l'article 1240, du code civil.