La décision de la Cour de cassation du 6 juin 2019, rendue par la 3e Chambre civile, porte sur la responsabilité d'un géomètre-expert à l'égard du maître de l'ouvrage dans le cadre de l'établissement d'un état descriptif de division et d'un règlement de copropriété.
La société P... a vendu un immeuble à Mme W... par acte authentique dressé par des notaires. Cet acte contenait une clause stipulant qu'une partie de l'immeuble se situait sur une parcelle dont Mme W... n'était pas propriétaire selon son titre. Ultérieurement, la société P... a vendu cet immeuble à la société Lovinvest qui l'a aménagé et soumis au statut de la copropriété. M. et Mme U... ont acquis le lot comprenant la partie de l'immeuble objet de la clause précitée. Lors de travaux d'aménagement, ils ont découvert la présence d'un conduit d'évacuation de la chaudière de Mme W... dans leur lot.
Mme W... a assigné le syndicat des copropriétaires et M. et Mme U... en nullité de la servitude stipulée dans son acte de vente et en démolition des constructions édifiées sur sa propriété. La société Lovinvest, les notaires et la société Estadieu, géomètres-experts, ont été appelés en garantie.
La question posée à la Cour de cassation est de savoir si le géomètre-expert, chargé d'établir l'état descriptif de division et le règlement de copropriété, est tenu d'attirer l'attention du maître de l'ouvrage sur le fait que partie d'un lot se situe sur une parcelle dont il n'apparaît pas propriétaire selon son titre, même si le maître de l'ouvrage est un professionnel de l'immobilier.
La Cour de cassation rejette les pourvois et confirme la décision de la cour d'appel. Elle considère que le géomètre-expert aurait dû attirer l'attention de la société Lovinvest sur le fait que le premier étage de son immeuble avait une surface supérieure à celle du rez-de-chaussée, ce qui signifiait que partie d'un lot se situait sur une parcelle dont la société Lovinvest n'était pas propriétaire selon son titre.
Portée : Cette décision établit que le géomètre-expert, même si le maître de l'ouvrage est un professionnel de l'immobilier, est tenu d'attirer son attention sur des éléments importants concernant la propriété, tels que des parcelles dont il n'apparaît pas propriétaire selon son titre. Cette obligation de renseigner vise à garantir la sécurité juridique des transactions immobilières et à éviter les litiges ultérieurs.
Textes visés : Articles 544, 637, 686 et 1134, devenu 1103, du code civil ; article 12 du code de procédure civile ; article 1147, devenu 1231-1 du code civil.
: Sur l'impossibilité de constituer une servitude créant un droit exclusif interdisant au propriétaire la jouissance de sa propriété, à rapprocher : 3e Civ., 24 mai 2000, pourvoi n° 97-22.255, Bull. 2000, III, n° 113 (cassation partielle).