Cet arrêt de la Première Chambre civile de la Cour de cassation, rendu le 9 septembre 2020, porte sur la compétence judiciaire en matière de trouble manifestement illicite résultant d'une atteinte à des droits privés. La Cour de cassation rappelle le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires et précise les limites du pouvoir du juge civil lorsqu'il ordonne des mesures contraires aux prescriptions édictées par l'autorité administrative compétente.
Le Syndicat intercommunal des Rossandes (SIVU) a confié à la société Suez eau France l'exploitation d'une station de traitement et d'épuration des eaux usées. Suite à des prélèvements et analyses révélant une pollution du cours d'eau à la sortie de la station, la Fédération départementale du Rhône et de la métropole de Lyon pour la pêche et la protection du milieu aquatique a alerté le préfet du Rhône. Ce dernier a mis en demeure le SIVU de prendre des mesures pour faire cesser la pollution. La Fédération a également assigné le SIVU et la société Suez, ainsi que d'autres parties, afin d'obtenir la cessation des rejets d'effluents non conformes aux prescriptions réglementaires.
L'affaire est portée devant la cour d'appel de Lyon en référé. Cette dernière ordonne à la société Suez de cesser le rejet des effluents non conformes aux prescriptions fixées par un récépissé de déclaration, sous astreinte. La société Suez forme un pourvoi en cassation.
La question posée à la Cour de cassation est de savoir si le juge civil peut ordonner des mesures contraires aux prescriptions édictées par l'autorité administrative compétente dans le cadre de ses pouvoirs de police de l'eau et des milieux aquatiques.
La Cour de cassation casse l'arrêt de la cour d'appel de Lyon. Elle rappelle que le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires s'oppose à ce que le juge civil ordonne des mesures contraires aux prescriptions édictées par l'autorité administrative compétente dans l'exercice de ses pouvoirs de police de l'eau et des milieux aquatiques. La cour d'appel aurait dû vérifier si l'injonction qu'elle prononçait ne contrariait pas les prescriptions de l'arrêté préfectoral mettant en demeure le SIVU de prendre des mesures pour faire cesser la pollution.
Portée : Cet arrêt rappelle le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires et précise que le juge civil ne peut pas ordonner des mesures contraires aux prescriptions édictées par l'autorité administrative compétente dans le cadre de ses pouvoirs de police de l'eau et des milieux aquatiques. Le respect des prescriptions administratives est essentiel pour garantir la cohérence et l'efficacité des mesures prises dans le domaine de la protection de l'environnement.
Textes visés : Loi des 16-24 août 1790 ; Décret du 16 fructidor an III ; Articles L. 171-8, L. 214-1 et L. 216-1 du code de l'environnement.