Cet arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation, rendu le 11 juillet 2018, porte sur la question de l'opposabilité d'une expertise et de la responsabilité des associés d'une société civile professionnelle (SCP) dans le cadre d'une action en responsabilité médicale.
M. X a subi un accident vasculaire cérébelleux ischémique bilatéral suite à une manipulation cervicale réalisée par J. Y, kinésithérapeute associé au sein de la SCP Mistral Kinés. M. X a engagé une action en responsabilité et indemnisation contre les héritiers de J. Y, l'assureur de ce dernier et la SCP. Une expertise en référé a été ordonnée contradictoirement à J. Y, mais celui-ci est décédé avant le début des opérations expertales. Les héritiers de J. Y ont cédé leurs parts sociales à un associé de la SCP.
M. X a assigné les héritiers, l'assureur et la SCP en responsabilité et indemnisation. La caisse primaire d'assurance-maladie de l'Hérault a également été mise en cause pour le remboursement de ses débours. La cour d'appel de Montpellier a rejeté la demande de M. X à l'encontre des héritiers au motif que ces derniers ne pouvaient plus être mis en cause depuis la cession de leurs parts sociales. La cour d'appel a également refusé de prendre en considération le rapport d'expertise pour statuer sur la responsabilité de la SCP.
La question posée à la Cour de cassation est de savoir si les héritiers de J. Y peuvent être mis en cause dans l'action en responsabilité engagée par M. X malgré la cession de leurs parts sociales, et si le rapport d'expertise est opposable à la SCP pour statuer sur sa responsabilité.
La Cour de cassation casse et annule l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier. Elle considère que la cession des parts sociales par les héritiers de J. Y n'a pas d'effet sur leur responsabilité, qui demeure engagée au titre des conséquences dommageables des soins prodigués par J. Y au sein de la SCP. La Cour de cassation estime également que le rapport d'expertise doit être pris en considération par le juge, même s'il n'est pas opposable à la SCP, et qu'il lui appartient de rechercher s'il est corroboré par d'autres éléments de preuve.
Portée : Cet arrêt rappelle que la cession des parts sociales d'un associé d'une SCP n'a pas d'effet sur sa responsabilité, qui demeure engagée au titre des actes professionnels qu'il a accomplis au sein de la société. De plus, il souligne que le rapport d'expertise doit être pris en compte par le juge, même s'il n'est pas opposable à une partie, et qu'il peut être corroboré par d'autres éléments de preuve.
Textes visés : Article 16 de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 ; article R. 4381-25 du code de la santé publique ; article 16 du code de procédure civile.
: 2e Civ., 7 septembre 2017, pourvoi n° 16-15.531, Bull. 2017, II, n° 168 (cassation partielle), et les arrêts cités.