Cet arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation, rendu le 12 septembre 2018, porte sur la question de l'application des règles de concurrence aux pratiques anticoncurrentielles dans le secteur de la production et de la commercialisation des endives.
L'Autorité de la concurrence a constaté que plusieurs organisations de producteurs d'endives, ainsi que des associations d'organisations de producteurs, avaient participé à une entente complexe et continue sur le marché français. Cette entente consistait en une concertation sur les prix et les quantités d'endives mises sur le marché, ainsi qu'en un système d'échanges d'informations stratégiques. Des sanctions pécuniaires ont été prononcées à leur encontre.
La cour d'appel a réformé la décision de l'Autorité de la concurrence, estimant qu'il n'était pas établi que les entités en cause avaient enfreint les dispositions des articles 101, paragraphe 1, du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) et L. 420-1 du code de commerce. La Cour de cassation a sursis à statuer sur le pourvoi formé par le président de l'Autorité et a interrogé la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) à titre préjudiciel.
La question posée à la Cour de cassation était de savoir si les pratiques anticoncurrentielles, telles que la fixation collective de prix minimum, la concertation sur les quantités mises sur le marché ou les échanges d'informations stratégiques, peuvent être soustraites à l'interdiction des ententes prévue à l'article 101, paragraphe 1, du TFUE dans le secteur agricole.
Décision de la cour de cassation : La Cour de cassation a constaté que la cour d'appel avait soulevé une difficulté sérieuse quant à l'interprétation des règlements portant organisation commune des marchés (OCM) dans le secteur des fruits et légumes, ainsi que sur l'étendue des dérogations spécifiques aux règles de concurrence que ces règlements pouvaient contenir. Elle a donc renvoyé la question à la CJUE.
Portée : La CJUE, dans son arrêt du 14 novembre 2017, a précisé que les pratiques anticoncurrentielles, telles que la fixation collective de prix minimum, la concertation sur les quantités mises sur le marché ou les échanges d'informations stratégiques, ne peuvent être soustraites à l'interdiction des ententes prévue à l'article 101, paragraphe 1, du TFUE lorsqu'elles sont convenues entre différentes organisations de producteurs ou associations d'organisations de producteurs, ainsi qu'avec des entités non reconnues dans le cadre de l'organisation commune du marché concerné. Cependant, de telles pratiques peuvent échapper à cette interdiction lorsqu'elles sont convenues entre membres d'une même organisation de producteurs ou d'une même association d'organisations de producteurs reconnue par un État membre et qu'elles sont strictement nécessaires à la poursuite du ou des objectifs assignés à l'organisation de producteurs ou à l'association d'organisations de producteurs concernée en conformité avec la réglementation de l'Union européenne. La Cour de cassation a donc cassé l'arrêt de la cour d'appel et renvoyé l'affaire devant une autre cour d'appel pour qu'elle se prononce à nouveau en tenant compte de cette interprétation de la CJUE.
Textes visés : Article 101, § 1, du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.
: Dans le même sens que : CJUE, arrêt du 14 novembre 2017, Association des producteurs vendeurs d'endives (APVE) e.a., C-671/15.