Cet arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation, rendu le 10 février 2021, porte sur la question de l'application des dispositions relatives à la rupture brutale des relations commerciales aux experts-comptables. La Cour de cassation précise que les experts-comptables exerçant une activité commerciale doivent établir que les prestations de services dont ils reprochent l'interruption brutale sont accessoires à leur mission d'expert-comptable et de nature commerciale.
La société SMI a confié à la société AGSC la tenue de sa comptabilité par une lettre de mission en octobre 2006. En mars 2011, la société SMI a décidé d'embaucher un comptable et a réduit les tâches confiées à la société AGSC. En juillet 2012, la société SMI a résilié le contrat la liant à la société AGSC, qui l'a assignée en paiement d'une indemnité de résiliation contractuelle et de diverses sommes en réparation des préjudices causés par la rupture brutale de la relation commerciale établie.
La société AGSC a formé un pourvoi en cassation contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 8 novembre 2018 qui a rejeté sa demande en paiement de dommages-intérêts pour rupture brutale de la relation commerciale établie.
La question posée à la Cour de cassation est de savoir si les dispositions de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce, relatives à la rupture brutale des relations commerciales, sont applicables aux relations entre la société SMI et la société AGSC, qui est une société d'expertise comptable.
Décision de la cour de cassation : La Cour de cassation rappelle que l'activité d'expert-comptable est incompatible avec toute activité commerciale, sauf si celle-ci est accessoire à la mission d'expert-comptable et ne met pas en péril les règles d'indépendance et de déontologie de la profession. En l'absence de publication de la norme professionnelle fixant les conditions et limites à l'exercice de ces activités commerciales, la Cour de cassation considère que les dispositions de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce ne sont pas applicables aux relations entre la société SMI et la société AGSC.
Portée : La Cour de cassation précise que les experts-comptables doivent établir que les prestations de services dont ils reprochent l'interruption brutale sont accessoires à leur mission d'expert-comptable et de nature commerciale pour pouvoir bénéficier des dispositions relatives à la rupture brutale des relations commerciales. En l'absence de publication de la norme professionnelle fixant ces conditions, les experts-comptables ne peuvent pas se prévaloir de ces dispositions pour demander des dommages-intérêts en cas de rupture brutale de la relation commerciale.
Textes visés : Article 22 de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945, portant institution de l'ordre des experts-comptables et réglementant le titre et la profession d'expert-comptable, modifiée par la loi n° 2010-853 du 23 juillet 2010 ; article L. 442-6, I, 5°, du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019.